dimanche 28 février 2010

B15.4 - La Voix - Thème PERSÉVÉRANCE

Le frère X nous a quittés
Par F. Florian, S. C. Montréal.
Article paru dans la Voix des Frères du Sacré-Cœur
Vol. XXXVI no 5 Janvier 1963 p. 156-165
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Le Frère Y aussi, Le Frère Z les a suivis.
Le Frère X était ce qu'on est convenu d'appeler un bon religieux. Du moins, il observait bien sa règle. La médiocrité du milieu a cependant corrodé sa volonté d'acier. Il souffrit de l'inertie du traditionalisme communautaire. Ses Frères le considéraient facilement comme un idéaliste. De plus, son milieu social ne péchait pas précisément par excès dans ses éloges à l'endroit des Frères. Il a quitté, souverainement déçu de ce qui l'avait d'abord fasciné.

Le cas du Frère Y est différent. Y n'avait, selon l'expression du Chanoine Leclercq, qu'une demi-vocation. Il l’a traînée plutôt qu'elle ne l'a poussé jusqu'au don total. Sa vie religieuse était un boulet qui s'est appesanti au point de devenir insupportable. Il a quitté, prenant un peu tard ce qu'on pourrait appeler une sage décision.

Le Frère Z, bon diable, était un faible malgré ses élans de générosité. Cet émotif n'a pas trouvé en communauté l’affection dont il avait soif. Un monde cajoleur l'a surpris et 1a pris.

Un problème d'insomnie
Si les cas des Frères X, Y et Z ne se multipliaient par trois, cinq et dix il n'y aurait pas lieu de s'y arrêter, la persévérance ne serait pas un problème.; ces défections , une anomalie. Dans une société comme la nôtre n'est-il pas normal que certains défaillent en route, que d'autres se trompent sur leur vocation réelle, qu'un idéaliste, à qui notre monde fait la vie si rude, se brise à vouloir trop grand? Mais que cinq ou six profès perpétuels quittent chaque année une province de trois cents Frères, voilà une situation anormale, inacceptable, une véritable cause d'insomnie pour tous.

Et qu'on ne glose pas avec une certaine moue ou en manière d'excuse: Bah! toutes les congrégations des Frères enseignants en sont là, les soeurs commencent à se plaindre du même mal et ... qui connaît le nombre de prêtres défroqués d’une grande ville, de Rome par exemple?
Généraliser la peste ne la rend ni plus normale ni plus acceptable. L*extension du mal indique cependant que ses causes dépassent le cadre des difficultés locales et qu'il faut chercher des remèdes autres que les cataplasmes ou les pilules des bobos ordinaires.

Reconnaissons-le, la persévérance religieuse qui de tout temps fut une montée ardue se pose actuellement à l'état de crise.(1) Dans un état d'urgence les moindres efforts comme les plus gauches sont les bienvenus. Une douzaine de Frères des différentes provinces canadiennes se réunissaient à Verdun le 25 novembre dernier, sous le patronage de La Voix, dans le dessein d'examiner les aspects essentiels du problème et de coordonner leurs efforts dans la façon de le traiter. Voici ce qu'on pourrait appeler l'orientation de base de leurs réflexions et un bref sommaire des articles qu'ils se sont engagés à vous livrer dans les prochains numéros de La Voix.

Un diagnostic
A première vue, notre mal serait d'ORDRE ORGANIQUE et d'ORDRE VITAL.

Il semble d'abord que nous subissions dans notre vie religieuse le contre-coup de l'ébranlement général qui s'est emparé de notre siècle et de notre civilisation occidentale en particulier. Des valeurs nouvelles y ont fait leur apparition. Elles portent nom de personnalisme, de fraternité humaine, de respect de la liberté, de valorisation du profane, de culte de l'authentique etc... Elles marquent notre siècle de caractères bien tranchés et transforment notre conception de la vie et de l'homme. Elles avivent la flamme de l'Église et pénètrent aussi dans nos communautés religieuses.

Chez nous, ces forces nouvelles transformeraient sensiblement l'image qu'on se faisait du Frère idéal. Elles tendraient à animer une vie religieuse par définition protégée et protectrice, d'un dynamisme nouveau, plus apostolique, rayonnant à l'extérieur, sans cadres rigides ni murailles d'aucune sorte.

Cet esprit nouveau, que nous respirons avec l'air du siècle, se sentirait forcément à l'étroit dans des cadres nés d'une autre conception de la vie. D'où l'impression d'éprouver dans toutes nos articulations un malaise organique aigu. L'on relève par exemple, l’inactualité de nombres d'articles de nos règles, l'inconsistance de certaines de nos prières et l’on s'interroge sérieusement sur la valeur de notre "formule" de formation. Nos traditions de pauvreté indigente crient devant une plus large utilisation des biens de la terre que de substantiels revenus et les besoins en cause rendent possible et nécessaire.

La primauté de l'autorité doit se concilier avec l'importance du dialogue. Le monde qu'on s'appliquait à éviter s'est installé dans nos cénacles les mieux gardés et il nous faut le connaître de plus en plus pour lui apporter vraiment la Bonne Nouvelle.

La vie de communauté est aussi gravement atteinte par l'ordre nouveau. Le fossé entre supérieurs et inférieurs s élargit sans cesse par la différence des cultures, le choc des idées à la mode, une activité facilement fiévreuse qui dévore les uns et les autres sans les réunir. La télévision a cloué à jamais cette soupape merveilleuse des petits malaises, qu'étaient nos récréations communautaires, pour encourager un individualisme égoïste et isolateur. Les Frères ont facilement l'impression de ne plus retrouver dans la vie communautaire, version moderne, le bonheur de nos hilarantes communautés d'autrefois. Pourtant le sens communautaire n'est pas aboli. Plus personnaliste et engagé dans une action élargie, il se chercherait comme à tâtons, des expressions nouvelles.

Désorientés dans notre vie nous sommes aussi atteints dans notre action. Le sens apostolique des Frères s'émousse vite dans l'accomplissement de tâches qui prennent souvent l'allure d'un fonctionnarisme desséchant. La présence des professeurs séculiers dans nos écoles dissout l’oeuvre communautaire d'autrefois dans la grande oeuvre de l'état. Et comment garder la foi en son influence éducatrice quand on la voit emportée dans le tourbillon de toutes les autres influences, beaucoup plus tapageuses, et condamnée à ne toucher qu'en passant des élèves qui ne font que passer? Par contre l'éventail des champs d'influence d'un éducateur s'élargit considérablement. Ce qui nécessiterait des cadres beaucoup plus souples. Là encore, il y a tension plus ou moins accentuée, malaise parfois aigu.

Bref, face à un monde tout transformé, les rouages de notre organisme communautaire sembleraient faussés, les bases de nos plus fières institutions, minées. Plusieurs auraient l'impression déprimante d'avoir perdu individuellement et parfois communautairement leur rai-
son d’être. Ce tableau paraît noir. Il serait injuste s'il prétendait exposer toute la réalité de notre vie religieuse. Nos malaises organiques, bien réels, ne nous touchent pas tous à la fois ni avec la même intensité. La réalité se compose de nuances qui atténuent bien l'âpreté des synthèses. De plus, comme l’ivraie de l’Évangile nos malaises organiques croissent à côté d'épis dont la qualité ne peut être mise en doute.

Qu'il nous suffise d'admettre que la croissance vertigineuse et quelque peu désordonnée de notre monde et l'insuffisance conséquente de nos institutions créent pour les devises religieuses une instabilité suffisante à projeter hors de l'Institut nombre de Frère X.

Organisme délabré ou anémie?
Faut-il cependant considérer ce malaise organique comme le grand responsable des débâcles de Juin? Notre grand cri de ralliement doit-il être: "ADAPTONS-NOUS"?
D'une part, le décalage entre notre vie religieuse et le monde moderne est-il aussi prononcé que le laissent croire les idées à la mode?

Notre titre de religieux-laies et notre fonction d'éducateurs ne nous accordent-ils pas au contraire foncièrement avec un monde qui place si haut les valeurs de l'éducation et accueille avec tant de sympathie les plus minimes efforts du laïcat? L'éducation est aujourd'hui le hamp ou se livrent toutes les batailles de l'Église. Cet accord de base avec notre siècle devrait entraîner comme naturellement les adaptations nécessaires qui ne peuvent être que d'ordre secondaire.

Question de décorer à la mode du temps un édifice qui demeure bien dans la ligne du siècle ou de pourvoir une machine encore solide et bien adaptée à sa tâche, d'accessoires utiles et récents. Et pouvons-nous honnêtement nous considérer comme des retardataires sur la voie des adaptations? Déjà un costume simplifié nous accorde mieux avec le monde. Et il serait trop long d'énumérer tous les réajustements secondaires qui sont entrés sans heurts dans nos moeurs de religieux à la page. Le mouvement irréversible et s'amplifiant toujours qui nous pousse vers les études ne traduit-il pas ce souci constant de rencontrer les exigences modernes? Le Cardinal Léger ne constatait-il pas dernièrement "qu'il y a d'énormes réformes qui s'opèrent depuis cinq ou dix ans au sein d'un grand nombre de nos familles religieuses"? (2) Nous pouvons, sans orgueil nous considérer à l'avant-garde dans l'application de ces réformes. Et il serait puéril de conclure qu'elles ne sont pas opportunes parce qu'elles s'accompagnent chez nous d'un plus grand nombre de défections. Force nous est de chercher ailleurs la cause de notre malaise.

D'autre part, le même courant qui nous ébranle ne voit-il pas naître et fleurir en son sein, dans les Instituts séculiers, une authentique pratique des conseils évangéliques? Le succès de ces instituts ne tient pas à des qualités de périphérie qu'on appellerait avec un peu d'emphase:; présence au monde, engagement, rejet de la clôture ou du costume distinctif.
D'autres instituts, aux habitudes beaucoup plus archaïques que le nôtre connaissent aussi en nos temps modernes un étonnant succès. Comme l'habit ne fait pas le moine, ce n'est pas non plus la formule qui compte.

Les instituts prospères s'imposent au monde par leur transparence du Christ et de l'Évangile. Cette transparence il ne la demandent pas à des cadres neufs ni à un organisme mieux adapté. Elle est absolument première et leur vient d’une application constante à déborder les problèmes que le monde ne manque pas de dresser devant eux. Elle anime aussi l'organisme qui devient ainsi vrai, donc adapté et parlant, quelle qu'en soit la forme.

Ainsi ce serait plutôt le faible indice de notre vitalité religieuse, autant dire évangélique, qui grossirait en problèmes de mineures difficultés d'adaptation. En tout cas, ce semble bien être une vitalité en régression ou une anémie latente, subitement mise à jour par l'ébranlement du monde, qui augmenterait démesurément le nombre des sorties.
Notre mal serait principalement D'ORDRE VITAL.

Anémie et vitalité religieuse
L'anémie retarde la maturité. Une vie religieuse anémique que demeure comme plantée dans un terrain de vague religiosité très peu nourricier pour une plante si exigeante. Un religieux non parvenu à la maturité religieuse qu'annonce sa profession perpétuelle se nourrit d'une foi imparfaite quelque peu égocentrique, bien incapable d'assurer la persévérance. Dieu n'est pour lui qu'un bien vers qui le porte un besoin plus ou moins véhément de son être et non cette personne que le religieux adulte rencontre dans la maturité de sa foi toute chargée d'amour. Sa vie religieuse ne sera appréciée qu'au prorata des salaires qu'elle paie: considération des gens, développement de la personnalité, gage de bonheur (et sur cette terre autant que possible), sécurité et protection sans oublier les résonnances humaines et terrestres du centuple qu'elle offre, résonnances tributaires de l'affectivité en enregistre lourdement les hauts et les bas. La baisse ou le refroidissement du sentiment propre à son âge, s'il est par ailleurs parvenu à une maturité humaine respectable, suffira à mettre la vocation en balance.
L'idéal religieux, brossé aux teintes de l'affectivité pendant l'adolescence, a perdu beaucoup de ses plumes au rude contact de la réalité. Les doutes sur la vocation affluent par toutes ces brèches. Il se croira vite frustré, il connaîtra l'amère déception du joueur qui constate avoir misé tout son avoir sur le mauvais numéro. La vie religieuse n'est plus rentable. Il faut la souffrir parce qu’on ne peut faire autrement ou avoir le courage de défroquer parce qu'on n'a pas eu celui de la vivre en totalité.

Une vie religieuse parvenue à la maturité relève au contraire de la foi parfaite toute imprégnée de charité où Dieu n’est pas cherché comme objet de contentement mais atteint comme Dieu, c'est-à-dire rencontré comme personne. Cette rencontre ne se réalise véritablement que dans un choix mutuel total, irrévocable, Le religieux adulte choisit Dieu comme l'unique de sa vie, dans l'absolu du DON TOTAL et il le choisit parce que le premier, DIEU L'A ELU DANS L'AMOUR. Tout le reste n'est que préparation ou fonction de ce choix.

L'optique d'un tel religieux est complètement différente de celle du religieux nageant dans le climat de religiosité que nous avons décrit. D'abord, le Frère ne recherche plus tellement à s’accomplir au moyen de la vie religieuse qu'à accomplir l'oeuvre de Dieu par sa vie religieuse et par toutes les ressources de sa personnalité. Sa vie religieuse n'a plus besoin d'être rentable pour être valable, il lui suffira d'être. Elle lui apparaît comme ce médium d'institution divine qui permet de rencontrer Dieu dans l'échange ineffable de l'amitié et de se consacrer à l'expansion de son oeuvre d'amour dans l'absolu du don total et perpétuel. Médium plus ou moins parfait il est vrai, et à perfectionner toujours et à adapter sans cesse au monde changeant, mais jamais de l'extérieur, toujours sous la poussée intérieure de cette donnée première: Dieu à mieux rencontrer, sa Parole à annoncer avec la profusion, la générosité et l'intelligence du divin Semeur.

Renaître tout entiers
Saisir la vie religieuse en ce jaillissement premier et total n'est certes pas chose facile. Cette embrassade "avec" la vérité dans la foi parfaite est fort exigeante. Il s'agit de comprendre et de vivre notre vie religieuse à ce niveau où il n y a ni règles à sauver ou à changer, en deçà des prières à adapter ou à maintenir, des murailles a élever ou à abattre, des adoucissements à permettre ou à prohiber, de la liberté même à diriger ou à débrider, à ce niveau où l'homme et Dieu se rencontrent, non pas dans la signature d'un contrat que seraient les vœux mais sous le sceau de l’amitié dans la VOIX DES CONSEILS.

Cette vie, il faut la retrouver dans toute sa nudité, dans la pureté de son premier jaillissement, dans ses exigences que les permissions et concessions ne sont pas venues altérer, dans son merveilleux dynamisme aussi qu'aucune administration n’a encore bridée. Il nous faut RENAITRE°TOUT ENTIERS, RELIRE L’ÉVAGILE, REAPPRENDRE L'AMOUR.

Nos Règles ne vont pas contre l'Evangile, c'est entendu. Mais elles ne sont pas l'Évangile, elles ne remplacent pas le Christ Elles seraient comme des ampoules que seul le Christ peut éclairer. Les changer ou les frotter quand le courant a été coupé ne change absolument rien. Sauver ou changer nos Règles n'améliore pas nécessairement notre vie religieuse qui se nourrit d'abord au contact du Christ et de son Évangile et s'exprime ensuite dans des règles, coutumes, traditions adaptations. La vie passe bien avant l'institution. D'ailleurs, on le sait sans souvent le comprendre, les institutions ne valent que par la vie qui les anime. C'est la vie dans ce qu'elle a de premier et d'immédiat qui serait d'abord menacée chez nous.

Le Frère X dans sa fidélité même aux observances de la vie commune, le Frère Z dans ses élans de générosité ne vivaient pas réellement leur vie religieuse. Ils nageaient sûrement plus dans la religiosité que dans la vie théologale. Que nombre de Frère X et de Frère Z et même de Frère B.qui demeurent dans nos rangs, ne parviennent pas à situer leur vie au niveau du don dans l'amitié, c'est là peut-être le signe le moins équivoque d'une anémie communautaire dont on peut relever par ailleurs bien d'autres manifestations.

Il serait vain, certes, de vouloir attendre ce fruit de maturité religieuse qu'est la vie théologale de tous les sujets de l’arbre communautaire. Il ne mûrit généralement pas avant une certaine maturité humaine. L' arbre communautaire devrait cependant, s'il était débordant de vitalité, FAVORISER l’éclosion et l'épanouissement de la vie théologale en tous ses sujets et la transpirer à l'extérieur par toutes ses branches. C'est à cette tâche qu'on devrait employer toute la batterie de nos secours communautaires allant des exhortations les plus canoniques aux ressources de notre « chialage » d’occasion. Notre cri de ralliement VIVONS et le reste viendra nécessairement et par surcroît.

Les articles à venir:
C'est donc, tous les membres de la commission l'ont reconnu, la faiblesse de notre vie religieuse plutôt que le poids des difficultés créées par un monde en transformation qui se trouve à la source de notre malaise. Aussi est-ce à exprimer toutes les virtualités d'une vie religieuse pleinement théologale et ses applications concrètes et immédiates à notre vie de tous les jours qu'ils s'emploieront dans les articles à venir.

1. Nous sommes malades, nous en convenons, notre remède c'est la nourriture solide d'une foi d'adulte. Mais un malade surtout anémique, n'a ni le goût ni la force de prendre les aliments qui le sauveront. Il faut qu'un tonique y pourvoie. Ainsi, nous faut-il d'abord retrouver le goût de la vie théologale parfaite. Le Frère Guy-Marie de Montréal nous indiquera, avec l'Esprit-Saint, la voie de ce retour aux sources de notre vitalité religieuse.

2. Dès que nous envisageons la vie religieuse comme cet te rencontre ou ce dialogue d'amitié entre l'homme et Dieu dans la foi parfaite, la persévérance perd son nom. Du moins elle ne signifie plus la répétition d'actes déterminés mais porte plutôt le nom, haut en couleur biblique, de FIDÉLITÉ.
Le Frère Maximien de Sherbrooke, après nous avoir dévoilé le sens de la fidélité biblique, nous amènera à repenser nos obligations religieuses dans le sens d'une fidélité à une personne sous le signe de l'amitié.

3. Cette personne à qui nous sommes fidèles dans la vie religieuse c'est le Christ. Persévérer signifie essentiellement suivre le Christ dans sa montée vers le Père. Encore plus, c'est accéder DANS et PAR le Christ à la communion personnelle et filiale au Toi divin. Qui est le Christ pour les Frères? Est-il cette présence de fidélité source de toutes nos fidélités, rencontrée dans la connaissance et l'amour?
(Frère Raymond, d«Ottawa.)

4. Il serait erroné de reléguer dans l'abstrait la participation du religieux à la fidélité du Christ. Elle engage au contraire concrètement et moralement dans le sillon des vertus théologales. (Frère Jn-Roch, Sherbrooke)

5. Elle engage aussi totalement au service de l'œuvre du Christ. C'est au Christ vivant dans l'Église que le religieux se montre fidèle. La participation à la fidélité du Christ à son Père signifie concrètement participation et fidélité à la mission de l'Église dans l'exercice de l'apostolat. (Frère Léo, Sherbrooke).

6. La fidélité apostolique pourrait se définir sommairement une préoccupation constante de rejoindre les âmes pour faire vivre le Christ en elles. Que signifie cette préoccupation pour un Frère du Sacré-Coeur mêlé aux nombreuses activités d'une école secondaire et soumis aux exigences de sa vie religieuse? Comment se dénoue dans la pratique l'apparente tension entre la fidélité à la personne du Christ dans sa vie religieuse et la fidélité à l'engagement apostolique? (Frère Jean-Pierre, Granby).

Si la vie théologale peut être analysée en soi, dans un ordre idéal et comme dans le meilleur des mondes, de fait elle n'existe jamais ainsi dans la réalité. En pratique elle se coule dans l'humain dont elle emprunte les formes, subit les limites et anime toutes les possibilités. Nous avons vu au début à quels remous notre réalité religieuse était soumise. Et nous sommes quotidiennement conscients des problèmes aigus que le monde en transformation nous pose. Cette deuxième série d'articles tentera de montrer la vie théologale composant avec l'humain de tous les jours la fidélité concrète de nos religieux du XXe siècle. Nous verrons ainsi comment la vie théologale apporte une solution aux problèmes toujours existants dans notre vie et dont nous avons tracé une rapide esquisse au début de cet article.
7 La vie théologale pénètre d'abord l'humain concret et individuel de son être psychologique. Quelles sont, en regard de la vie religieuse, les données psychologiques à ne pas oublier et leurs applications les plus immédiates à la fidélité du religieux-enseignant? (F. Pierre-Arthur, Granby)

8. La vie théologale, se coule dans l'humain social aussi. Le Frère Marie-Joseph, (Granby) analysera les incidences de la société actuelle sur la fidélité des Frères.

9 II y a l'humain communautaire aussi. Le Frère Charles-Emile (Granby) examinera l'aspect communautaire de notre vocation, la vie commune étant, comme on le sait, une des composantes essentielles de la vie religieuse. Dans un premier article, il essaiera d'en montrer les justifications fondamentales en interrogeant l'histoire et la théologie. Puis, dans un autre, il proposera quelques réflexions sur la mise en oeuvre que nous faisons ou que nous devrions faire de ces données de base dans nos temps difficiles.

10.La fidélité religieuse s'inscrit aussi dans le temps. De fait l'on ne parle pas de la persévérance sans mettre en cause les différents stages de formation. Le Frère Georges-Albert (Sherbrooke, Maître au Second Noviciat) fera l’étude du couple formation et transformation de soi dans la fidélité du religieux.

11 Si la fidélité d'un religieux au Christ est d'abord une responsabilité personnelle, c'est aussi une responsabilité communautaire qui pèse à la fois sur les supérieurs et les inférieurs. De plus, c'est communautairement qu'on est fidèle au Christ et à l'Église. N'y a-t-il pas des démissions communautaires qui afffectent l'Église aussi déplorables que les départs qui trouent nos rangs chaque année? (Frère Gédéon, Granby, Dir. de l'Ecole Secondaire Richard de Verdun)

Cette série d'articles ne peut ni ne prétend épuiser le sujet de la persévérance. Plusieurs aspects importants n'ont pas été abordés directement: "persévérance et vie de prière", persévérance et profession perpétuelle", statistiques comparées et interprétées sur la persévérance etc.,...Et à chacun des aspects étudiés, l'on peut toujours apporter des précisions et des corrections utiles. Les membres de la commission d étude n'ont voulu qu'amorcer une vaste réflexion sur un sujet qui nous concerne tous. Ils seraient des plus heureux si leurs articles pouvaient déclencher de ces réactions à chaîne qui permettraient vraiment de s'intéresser au problème et de l’approfondir. La parole est à vous tous et La Voix (toujours VOTRE VOIX) publiera avec empressement, et dans ses colonnes spéciales, tout article concernant la persévérance.

Si cette étude de la fidélité religieuse nous amène à fouiller quelques problèmes communautaires, ce n'est pas pour satisfaire un certain "sadisme" ni pour répondre à l'attrait du sensationnel. C'est l'amour profond de notre Institut qui nous a inspiré cette initiative et c'est le souci de la plus exacte vérité qui en accompagnera la réalisation.
Puissent ces articles apporter à notre vie religieuse le plus de lumière possible et l'embraser encore davantage de la charité du Coeur de JésusI

(1) Une première prise de conscience du malaise le saisit au niveau de l'institution c'est-à-dire de notre organisme religieux dans tout ce qu'il comporte de lois, de traditions et de cadres. Ce qui pose le problème de l'adaptation. N'est-ce pas en gros, ce genre de problèmes que soulèvent presqu'exclusivement nos conversations sur le sujet? Pour un chercheur plus patient, l'analyse et en conséquence, l'application des remèdes, va jusqu'au principe intérieur qui anime les organismes les plus variés. N'y a-t-il pas, à la source de tous les malaises d'ordre organique que nous pouvons relever facilement, un malaise plus profond, d'ordre vital?

(2) Le Devoir, 28 déc. 1962, p. 1.

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