mardi 21 juin 2011

Mes années d'enseignement à la section classique St-Georges de Beauce - 1963-66

Après une année d'études à temps complet à Montréal durant l'année scolaire 1962-1963, je reprenais ma tâche d'enseignant, cette fois, à la Commission scolaire régionale de La Chaudière (CSRC), à Ville Saint-Georges, en Beauce. À l'époque, les fusions municipales n'étaient pas encore très populaires. Saint-Georges-Est comptaient 6000 habitants et Saint-Georges-Ouest, à peu près le même nombre. Aujourd'hui, en 2010, Saint-Georges s'est beaucoup développée et aussi, grâce aux fusions, la municipalité compte au moins 30 000 habitants.

En 1963, on commençait à créer les Commissions scolaires régionales et on songeait à bâtir les premières écoles secondaires polyvalentes. C'était Marius Bélanger, de Saint-Côme, qui a été le premier président de la CSRC. Chaque hiver, il était foreman dans un chantier de bûcherons du Maine. À tous les 15 jours, un technicien en administration se rendait au chantier pour faire signer les chèques de paye de tous les employés de la CSRC.

Au cours de l'année scolaire 1963-64, je suis professeur-titulaire de la 8e année classique à l'école Lacroix, à Saint-Georges-Est, où l'on a regroupé les garçons des deux premières années du secondaire; je suis professeur de français, de latin, des mathématiques et de catéchèse. En plus, je surveille les cinq études du matin et les cinq périodes de travaux scolaires en fin d'après-midi.

L'année scolaire 1964-1965, je suis toujours à l'école Lacroix mais titulaire de la 9e année classique; mon horaire prévoit l'enseignement du français, du latin, du grec et de la catéchèse. Des surveillances d'études, de travaux personnels et de deux périodes du dîner. On me confie également deux périodes d'enseignement de l'espagnol dans le cadre des activités dirigées.

Enfin, durant l'année scolaire 1965-1966, je suis promu encore une fois et me voilà titulaire de la 10e année classique pour garçons à l'école Notre-Dame-de-la-Trinité, à Saint-Georges-Ouest. J'assume l'enseignement du français, du latin, du grec, de la catéchèse et la surveillance des études et des travaux personnels. On ajoute à mon horaire quatre périodes d'enseignement de la dactylo dans la classe de la 10e année commerciale.

Comme la commission scolaire avait vraiment une vocation régionale, mes élèves provenaient de 17 municipalités différentes. Au total: 36 élèves, la plupart ayant eu l'avantage de m'avoir comme titulaire trois années de suite. Était-ce vraiment un avantage ?

Leur provenance:
La Guadeloupe 1 Notre-Dame-des-Pins 1
Ste-Aurélie 3 St-Benoit 1
St-Benjamin 4 St-Côme 4
St-Éphrem 3 St-Gédéon 2
St-Georges-Est 4 St-Georges-Ouest 4
St-Honoré 1 St-Ludger 1
St-Martin 1 St-Philibert 1
St-Prosper 3 St-René 1
St-Théophile 1

Durant ces trois années, 1963-1966, j'habitais sur le boulevard Lacroix-Est, à Saint-Georges. J'ai enseigné pendant deux ans, tout juste en face, à l'école Lacroix. Le directeur était Borromée Bourque. La dernière année, je devais traverser le pont de la rivière Chaudière pour atteindre l'école Notre-Dame-de-la-Trinité où Lionel Bécotte était alors directeur.

Je garde un excellent souvenir de mes confrères de Saint-Georges: Jean-Charles, le supérieur, Lionel, le directeur du secteur garçons à N-D-de-la-Trinité, Arthur, le bibliothécaire, Louis-Philippe, prof au CPES et les autres enseignants: Henri, Denis, Jean-Marc et Jean-Pierre. Au total, nous étions neuf éducateurs religieux dont seulement quatre persévérèrent.

Les loisirs à Saint-Georges:

À l'automne, la chasse au petit gibier occupait une bonne partie de nos samedis. À cinq ou six, nous envahissions les bois environnants, près de la rivière Famine, du côté de Saint-Philibert ou dans les environs de Saint-Honoré-de-Shenley. Nous chassions le lièvre à la carabine de calibre 22. Il n'était pas rare de revenir à la maison avec 20 ou 25 lièvres, parfois plus. On en mangeait souvent en civet et on en avait assez pour en donner.

En hiver, nous aimions parcourir à skis les vastes terrains du séminaire de Saint-Georges. On faisait du cross-country. Mais ce qui nous plaisait davantage, c'était les quelques journées passées au centre de ski alpin de Vallée-Jonction. Bien qu'assez rudimentaire, le centre nous permettait de faire plusieurs descentes dans la même demi-journée. Pour remonter la côte, nous nous agrippions à un câble actionné par un moteur, tout en essayant de garder les skis dans les ornières. En fin de journée, nous commencions à avoir les bras morts et parfois le câble nous glissait des mains et tachait nos parkas.

Contrairement aux habitants de Saint-Jovite dans les Laurentides, les Beaucerons n'avaient pas l'occasion de voir les «flying robes». Pour pratiquer ce sport, on prenait soin d'enlever nos «costumes» de sacristie. Hum !

À une occasion, nous avons traversé la frontière américaine pour passer une journée complète à dévaler les pentes à Enchanted Mountain, au Lake Parlin, près de Jackman dans le Maine. Poma et T-bars étaient à notre disposition. Quel progrès en comparaison avec le centre de ski de Vallée-Jonction !

À une occasion, je me souviens d'avoir endossé l'uniforme du joueur de hockey pour une rencontre amicale entre professeurs et élèves. Je ne crois pas avoir soulevé l'enthousiasme de la foule. Par contre, mon collègue Jean-Marc était très apprécié comme gardien de but.

Avec Denis Rousseau, j'ai goûté aux joies de la pêche sportive. Chaque printemps, nous parcourions quelques lacs de la région. Je me souviens du lac Poulin, à Saint-Benoît-Labre. Parfois, au cours de la troisième année, nous nous rendions même au lac Sunday, dans la municipalité de Saints-Martyrs-Canadiens.

Les sorties culturelles:

Le directeur d'école, Lionel Bécotte, organisait à chaque année de fameux débats oratoires entre les élèves de différentes écoles secondaires de la Beauce. Ces soirées attiraient beaucoup de spectateurs au vieux théâtre de Saint-Georges-Ouest.

Chaque année, nous avions l'occasion d'assister à une dizaine de concerts offerts par les Jeunesses musicales du Canada. De plus, je me souviens également d'avoir assisté au Cinéma de Saint-Georges-Est à un récital de notre chansonnier Gilles Vigneault. Sa mère était présente dans la salle.

La grande salle de l'école Notre-Dame-de-la-Trinité accueillait à la fin de chaque année scolaire de belles soirées musicales où les talents locaux étaient très appréciés. De sosies du groupe César et ses Romains avaient été chaudement applaudis.

La vie pédagogique de l'école:

Sous l'habile gouverne du directeur des Services pédagogiques de la Régionale, Jean-Charles Daigneault, qui était apprécié de tous, durant l'année scolaire 1965-1966, plusieurs comités, formés d'enseignants des différentes matières, se réunirent fréquemment pour préparer les devis pédagogiques de la future polyvalente de Saint-Georges. Pour ma part, je me souviens d'avoir été élu président du comité des langues et civilisations gréco-latines.

L'Opération 55 avait pour but de regrouper tous les élèves du secondaire public du Québec en 55 commissions scolaires régionales. Celle de La Chaudière fut la cinquième de la province à être créée. Les administrateurs de ces regroupements n'ont pas toujours eu la tâche facile, surtout en Beauce où chaque petite municipalité voulait avoir une polyvalente dans sa cour. Et dans bien des cas, il semble que pour les Beaucerons, il était impossible de «remonter le courant de la rivière». En effet, les Beaucevillois ne voulaient pas fréquenter les écoles de Saint-Georges; les habitants de Saint-Joseph ne voulaient pas envoyer leurs élèves à Beauceville; jamais un Georgien n'aurait fréquenté une école située à Saint-Martin, et ainsi de suite.

L'achat d'une première voiture:

Au printemps 1965, une grande nouveauté. La communauté décide d'acheter une première voiture, une Ford de l'année. Personne ne possède de permis de conduire. Cinq d'entre nous décident de prendre le volant à tour de rôle pour faire quelques pratiques dans les environs et l'on se rend à Saint-Joseph-de-Beauce, le chef-lieu du comté, pour passer les examens théoriques et pratiques. Une formation... accélérée. Il en coûtait à l'époque deux dollars pour obtenir le permis, bon pour deux ans. Aujourd'hui, il faut payer aux environs de 86$ pour la même durée.

Les principales usines de Saint-Georges:

À St-Georges, du côté ouest, on retrouvait la Dionne Spinning Mills. Cette entreprise de textile manquait de main-d'œuvre dans les années 30. Le propriétaire Ludger Dionne s'est tourné vers l'étranger et a recruté une centaine de Polonaises dont un bon nombre se sont établies dans la région par la suite.

Du côté est, la compagnie Saint-Georges Woolen Mills, propriété de monsieur Edouard Lacroix, était située à proximité du ruisseau de l'Ardoise et de l'église de L'Assomption. Cette entreprise employait plusieurs personnes également. On y fabriquait des tissus de laine destinés à la confection de vêtements.
Canam-Manac, Procycle, Beauce Métal, Murox et plusieurs autres entreprises n'étaient pas encore créées.

Les églises de Saint-Georges:

L'église de la paroisse-mère de Saint-Georges a été construite à l'ouest de la rivière Chaudière au tout début du 20e siècle. Ce joyau patrimonial charme les visiteurs par son architecture et sa riche et abondante décoration intérieure constituée de sculptures, de dorures et d'œuvres d'art.

Du côté est de la rivière, l'abbé Jean Duval fut, en 1950, le véritable fondateur de la paroisse de L'Assomption. Il fut choisi par l'évêque pour sa qualité de diplomate. Le milieu paroissial et municipal de St-Georges avait grand besoin de cette qualité car l'éventuelle division de la paroisse créait de vives tensions.

La syndicalisation des enseignants religieux:

Au printemps 1965, tout le personnel enseignant du secteur public québécois devait adhérer à la Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ) et par conséquent participer au Régime de retraite des enseignants (RRE). Religieux et laïcs étaient maintenant traités sur le même pied. Même salaire, même fonds de retraite, même cotisation.

Je me souviens que, lors de la négociation provinciale de 1963, les enseignantes se battaient alors pour obtenir le même salaire que les infirmières, soit 100$ par semaine. Surprenant !

Conclusion:

J'ai bien apprécié mon séjour de trois ans à Saint-Georges. C'est avec regret que j'ai dû quitter cette région pour celle des Bois-Francs. J'y passerai les quatre prochaines années avant de m'établir définitivement à Québec, la capitale nationale.

Jean-Guy LeGault,
L'Ancienne-Lorette,
septembre 2010.


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