samedi 10 septembre 2011

27 février 2010

mardi 9 août 2011

Annexe 8 (2) Frère Camille Hubert Houle

Agenor sur la toile

C'était en 1943. Au printemps, le 23 avril exactement, vers 6 heures du soir le vendredi-saint de cette année-là. Pâques et sa lune étaient alors à leur limite plus tardive. Rentrant de faire le train chez Ernest Allard, comme à l'accoutumée, j'ai aperçu le Frère Camille assis dans la berçante de la grande cuisine d'hiver. En grande robe noire, un petit crucifix jaune sur la poitrine, autour de la taille quatre rangs d'un cordon de laine noire qui se terminait par deux fascinants pompons. Le scapulaire à quatre plis, bien pressés et le petit capuchon miniature nous intriguaient aussi. Pourquoi ceci et cela aurions-nous aimé à lui demander. Nous n'osions pas, tellement il imposait le respect et l'admiration silencieuse.

Il avait apporté des cadeaux pour chacun des enfants. Clément, qui avait alors quatre ans, se souvient encore du petit avion de carton, lesté de plomb qu'il lui avait offert. S'il a peu volé dans la grange ce petit avion a sillonné longtemps le ciel de nos souvenirs.

Frère Camille, nom qu'il portait dans le temps, venait me chercher pour rentrer au Juvénat à Granby. Depuis les Fêtes, j'avais correspondu quelques fois avec lui. Ses lettres me fascinaient aussi par leur belle écriture régulière. C'était la coutume chez les Frères de faire à Pâques une entrée des jeunes de 7ième ou 8ième années. On voulait ainsi passer avant le séminaire qui faisait à l'été la rafle des jeunes talents.

J'étais prêt. Pour treize dollars maman m'avait acheté du "pedler" un habit bleu pâle comprenant un veston et une paire de pantalons bouffants (breetches) . Il y avait aussi une jaquette blanche pour la nuit, quelques débarbouillettes et serviettes de toile et, je me souviens, un outil rare alors, la brosse à dents avec, pour économiser, de la poudre à dents au lieu de la pâte plus dispendieuse.

Tôt le lundi de Pâques, après le train et un déjeuner aux crêpes, papa au volant de la Durant 1929, maman, Frère Camille et moi nous partions pour Granby. J'avais un peu le coeur gros car je savais que je serais longtemps avant de revenir. Mes frères et soeurs eux s'en foutaient royalement. Ils profitaient de leur congé et j'ai dû leur arracher des bonjours gênés et des poignées de mains qui cachaient mal des rires étouffés.

On avait prévu un arrêt pour dîner chez tante Rose et un coucher à St-Hyacinthe sur la rue Raymond. Dans la savane nous avons dû nous faire remorquer à deux reprises par des "teams" de chevaux tellement la route était minée de "ventres de boeuf".

Le lendemain, mardi le 27 avril à Granby ce fut vite fait. Un court instant dans le bureau du Frère Maxime qui me présenta mon ange-gardien, Yvon Jutras de la Visitation, puis le tour des casiers où maman m'a aidé à placer mon linge. De retour au parloir, on s'est dit un rapide bonjour, pas même le temps de pleurer, l'angélus avait sonné et il fallait rentrer au réfectoire. Frère Camille devait manger au réfectoire des Frères et repartir pour Ottawa dans l'après-midi après m'avoir salué rapidement. Je ne devais le revoir qu'à l'été. J'appris aussi par la suite qu'en retournant seuls à la maison papa et maman avaient pleuré "comme des veaux." Je ne devais retourner à la maison, ensoutané, que cinq ans plus tard, à l'été de 1948.

Ces courts instants avec Frère Camille ont suffi à faire naître et croître en moi une très grande admiration pour lui. Frère Camille enseignait à Ottawa. Parce qu'on y parlait l'anglais et qu'on envoyait dans ces écoles les frères les mieux qualifiés Frère Camille jouissait de ce fait d'un très grand prestige qui était rehaussé par les nombreux diplômes qu'il avait obtenus en peu de temps.

À l'été, le Frère Camille s'est présenté à moi avec non plus sa petite croix jaune mais avec une grande croix argent. Il venait de faire la grande retraite, vingt-et-un jours en silence, et de prononcer ses voeux perpétuels. Le crucifix blanc au lieu du crucifix or que l'on portait après les derniers voeux marquait un effort de guerre de la communauté.

Pendant cinq ou six ans mes contacts avec Frère Camille furent espacés et de courte durée. Il était de passage durant les vacances, à l'occasion de la retraite annuelle. mais il devait vite repartir pour continuer des études ou remplir les obédiences qu'on lui donnait toujours en Ontario ou dans l'Ouest.

En 1952, je crois, nous avons passé toute une vacance au camp de Chertsey. Il était professeur de psychologie pour les frères. Je n'étais pas inscrit à ses cours mais je me souviens des boîtes de fiches qui remplissaient l'espace en dessous de son lit. Il faisait alors une recherche à l'Université d'Ottawa sur les goûts. Ces boîtes de fiches, c'était des tests qu'il avait passés en différents milieux et qu'il devait dépouiller une à une afin d'étayer sa thèse sur la provenance des goûts et leur influence dans la psychologie humaine.

Travail de moine qui devait le préparer à une tâche plus gigantesque encore, celle de la généalogie.

Puis, en 1954, grande nouvelle dans la communauté, Mgr Blais de Prince-Albert prenait entente avec le Frère Rosaire, alors provincial et originaire de l'Ouest, pour ouvrir deux écoles dirigées par les Frères du Sacré-Coeur dans son diocèse en Saskatchewan. C'est le Frère Camille qui est désigné comme directeur fondateur de l'école de Zénon Park. Il y demeurera deux ans puis prendra la charge de la communauté de Prince-Albert.

Les diverses obédiences l'enverront successivement à Embrun, Alexandria, Haileybury, Timmins, et Cornwall.

Et en 1970 c'est l'archevêque d'Ottawa qui a besoin d'un chancelier pour le tribunal matrimonial. Le Frère Hubert reprendra alors le chemin de l'université de St-Paul à Ottawa puis ira compléter sa formation en droit canon à Rome pour occuper en 1971 le poste de chancelier à la défense du lien au Tribunal matrimonial de l'archidiocèse d'Ottawa. Il gardera cette fonction jusqu'à son transfert à Granby en 1993.

Et pendant tout ce temps le frère Hubert développe un hobby qui deviendra un grand arbre, celui de la généalogie.

Machine à écrire toutes les fiches ou presque des généalogies montées par Frère Hubert

Il m'a été donné de voir à Eastview tout un mur de tiroirs de fiches où il avait inscrit patiemment les actes de naissance, de mariage et de décès d'un grand nombre de paroisses du Québec et de l'Ontario.

Le Frère Julien était alors directeur de la manécanterie Meilleur. Il allait donner des concerts dans un très grand nombre de paroisses. Dans ces circonstances il logeait au presbytère et occupait ses temps libres à relever les actes des registres paroissiaux. Frère Hubert les transcrivait sur fiche, les classait et publiait des répertoires qui ont fait le bonheur d'un grand nombre de généalogistes.

Répertoires généalogiques publiés par le Frère Hubert

L'oeuvre ainsi accomplie par Frère Hubert est colossale. Les généalogies des familles Houle, Côté et Jutras qu'il a dressées, représentent une très petite fraction de ce qu'il a publié en fait de répertoires et de compilations de données de toutes sortes. La bibliothèque de Montréal a inscrit sur micro-film la plupart de ces fiches et la ville de Longueil a acheté toute sa collection en 1995.

La discrétion a toujours été une qualité charnière de la riche personnalité de Frère Hubert. C'est pourquoi nous connaissons très peu ce qu'il a réalisé.

L'humour fin et subtil, celui qui fait sourire sans éclat, trait d'une grande intelligence, a été cultivé avec beaucoup de succès par Frère Hubert. C'est ce qui rend agréable toute conversation avec lui. Sans trop qu'on s'en aperçoive la conversation prend des détours insoupçonnés et se termine souvent par une fine pointe d'humour, fleur de fascination et d'émerveillement.

Il y aurait beaucoup de choses à écrire sur Agenor qui n'a pas assez de trois noms pour porter toutes les richesses qu'il recèle. Je vous laisse le plaisir de les découvrir.

Florian Jutras

Curriculum vitae
Chronolotgie

Né à St-Cyrille de Wendover le 6 février 1918
Entrée au Juvénat des Frères du Sacré-Coeur le 28 décembre 1934;
Au noviciat le 15 août 1936; Premiers voeux le 15 août 1937;Voeux perpétuels le 19 juillet 1943

Nom en religion: Frère Camille S. C.(1936-1955) Nom en religion: Frère Camille S. C.(1936-1955)
- depuis, Frère Hubert A. Houle S. C.

Qualifications
1938:Dipl.d'enseignement sup. bilingue (Qué)
1940: Baccalaauréatg ès-arts - Un. de Montréal
1941: 1st Class Teaching Certificate (ont.)
1941: Baccalauréat en pédagogie - Un. Montréal
1945: Maîtrise en Psychologie - Un Ottawa
1952: H. S. Assissstant's Certificate (Ont.)
1954: Professional Teaching Certificate (Sask.)
1967: Intermediate Guidance Cert. (Toronto)
1973: Licence en Droit Canonique (Univ. St-Paul)
1973: Maîtrise ne Dr. Can. (Univ. d'Ottawa)

Obédiences
1940-53: Ottawa - Enseignant
1953-54: Études à Rome
1954: Eastview - Directeur d'école
1954-56: Zénon Park Sask. Dir. Ecole secondaire
1957-59: Embrun
1959-60: Alexandria - Directeur
1957-59: Embrun
1959-60: Alexandria - Directeur
1960- 65: Hailerybury Dir. École sec.
1965-68: Timmins Dir. École secondaire
1968-1970 Cornwall
1970-72: Université St-Paul Ottawa
1971: Grégorienne Rome - Chancelier au tribunal matrimonial Archi diocèse d'Ottawa - généalogie
1972-1980: Vicaire judiciaire au tribunal matrimonial Diocèse d'Ottawa
1980-87 Daly Ott. Tribunal d'appel du Canada - cause d'annulation de mariage
1987-93 Rés. Fullum Montréal Tribunal d'appel - Généalogie
1993-2002 retraite - Mont-Sacré-Coeur Granby
2004-2008 Infirmerie Maison provinciale Arthabaska
2008 ... Infirmerie Ancienne Lorette Québec




jeudi 14 juillet 2011

« Vox clamentis in deserto". La voix qui crie dans le désert – Isaïe 40,3

La mission des Frères du Sacré-Cœur, héritée du  père André Coindre _______________________
par  Frère Claude Paradis S. C..


En préambule, précisons que le désert, sous la plume d’Isaïe n’avait pas la signification d’un lieu physique aride, mais celle du lieu privilégié de la révélation.

J’ai rencontré frère Claude Paradis à sa demeure sur la rue d’Orléans dans le quartier Hocheolaga-Maisonneuve. Tout en maintenant des liens étroits avec sa communauté, il y vit seul depuis onze ans.

Pendant les 68 premières années de sa vie on peut dire que Claude a suivi l’itinéraire classique d’un grand nombre de Frères du Sacré-Cœur : naissance en ville dans un quartier ouvrier, fréquentation de l’école des Frères, entrée au Juvénat à l’âge de 13 ans.

Après cinq ans de formation il fit son apprentissage de l’enseignement à l’École Meilleur puis fut nommé à Gracefield où il oeuvra pendant six ans.

 En 1958, il fut envoyé en Côte d’Ivoire, puis, en Haïti en 1970. Il contribua avec Madame Louise Alary à la mise en marche de la Fondation Crudem. Tout en continuant d’assumer son rôle d’enseignant à l’intérieur de sa communauté, il mit en marche, avec les populations concernées, souvent secondé par André Camaraire, un des vice-présidents d’Hydro-Québec, de nombreux projets de développement dans les régions de Milot au Sud du Cap-Haïtien et de la Sucrerie Henri, près de la ville des Cayes. Son implication en milieu défavorisé, le sensibilisa à la pertinence de la mission que le père André Coindre avait donnée à sa communauté. Petit à petit, il mesura l'écart que sa communauté avait pris par rapport à cette mission.

En 1997, de retour au pays après avoir œuvré trois ans en Polynésie, et après avoir tenté au pays quelques actions en milieu défavorisé, il fut nommé directeur des études à l’Externat Sacré-Cœur de Rosemère. Après trois ans, à la suggestion de son supérieur, il quitte le milieu confortable de l'éducation institutionnelle pour s’installer sur la rue d’Orléans là ou il demeure seul depuis onze ans. 

Vivant dans ce quartier il prit une meilleure connaissance et conscience de la grande pauvreté matérielle et spirituelle dans laquelle vivaient les résidents de ce milieu. Frappé d'une  maladie qui réduisit sa mobilité il consacra ses moments libres à décrire son cheminement, à noter ses expériences et à faire part de ses réflexions dans de nombreux écrits fixés sur supports informatiques.

Plusieurs de ces écrits expriment sans complaisance sa vision de la vie religieuse marquée par l'admiration qu'il a toujours pour le Père Coindre fondateur de l'Institut. Dans un langage direct, fourmillant d’images kaléidoscopiques éclairées par l’intensité de la vision il nous dit sa foi en Jésus, dans la force de transformation de l'.Évangile et son souci des nombreux pauvres et laissés pour compte qui vivent parmi nous et que souvent nous ne voyons pas. 
Quelques glanures vous donneront ici une petite idée de l'originalité de sa pensée et de son cheminement.
F. J.

Le Père André Coindre

Claude dit s'ètre intéressé très tôt au fondateur de l'Institut.  La plupart d'entre nous, jusque vers les années 60 on a connu et retenu de notre fondateur que l'image du volumineux buste en platre qui occupait le parloir du Mont-Sacré-Coeur à Granby. Claude a surtout été sensible à la mission que le Père Coindre avait léguée aux frères et aux soeurs des communautés qu'il avait fondées. . Voyons ce qu'il en dit aujourd'hui.

André Coindre, comme d'autres de son époque, fut interpellé par la détresse des enfants laissés à eux-mêmes. Son zèle missionnaire l'incita à s'impliquer. Il a d'abord recueilli des jeunes filles et en confia la garde à des femmes qu'il a su inspirer. Il s'est penché sur le sort des jeunes garçons, errant dans les rues de Lyon. Il en a d'abord hébergé quelques-uns au Pieux-Secours, un immeuble qu'il a équipé de métiers à tisser, pour initier les jeunes au travail et leur permettre d'espérer une vie honorable. Il s'est aussi ému devant la détresse des jeunes délinquants emprisonnés avec des adultes dans les prisons mal tenues de l'époque. Il a aussi créé pour eux un foyer.

Qu’avons-nous fait de cette mission?

"Nos œuvres se sont transformées en usines productrices de diplômés, en boîtes spécialisées dans de savants dressages en oubliant l'essentiel de notre vocation première. Serions-nous, spirituellement devenus stériles et gâteux? Il est trop tard. Nous sommes trop imprégnés de nos sociétés aseptisées et compartimentées, pour revenir à la grâce d'origine. La disparition de notre entreprise évangélique devenue inutile est inévitable. Il ne reste d’avenir qu’un confort béat et notre bonne conscience de petits vieux satisfaits."

Réfléchissant sur la mission d'évangélisation proposé par le concile Vatican II, Claude en tire des applications pratiques quant  au virage que doit prendre la mission des religieux dans l'Église. 

"Évangéliser la culture signifie rendre Dieu visible aux hommes. Non le médiatiser comme une vedette mais le faire transparaître à travers nos actions, nos vies comme l’a fait Soeur Teresa et tant d’autres. Pour cela il faudrait vraiment vivre l’amour du prochain, être présents près des pauvres, des rejetés."

... "Entrer en contact avec des drogués et putains des deux sexes est moins valorisant et n’égale point le sentiment de bonne conscience que donne une démarche vers le temple. Un atterrissage parfait sur un grand boulevard est beaucoup plus spectaculaire et médiatisé que le versement d’une obole à un crasseux."

Sa vision de l’humble implication de Mère Theresa et de ses petites sœurs banalise nos petites œuvres.

"Les petites soeurs de Mère Teresa se développent partout, surtout en pays où la misère est banalisée. Elles ne se contentent pas, à l’occasion de Noël, de distribuer un plat de soupe aux malheureux. Les responsables de nos institutions religieuses s’occupent de leur patente, veillent à l’observance de pratiques inadaptées aux contextes sociaux actuels, tout comme l’Église encore engluée dans des prescriptions dépassées du concile de Trente. Le régime religieux n’a pas encore redécouvert le moteur à explosion... de l’évangélisation. La machine est en panne."

Ces considérations l'amènet à poser un regard critique sur le devenir de sa communauté.

"La communauté a perdu sa vocation. Ce n'est pas les petits vieux rentés, hésitant entre la sécurité et le confort, qui vont la ressusciter: ce n'est plus une guérison qui s'imposerait mais une véritable résurrection. Il est plus facile et agréable d'écouter les flagorneurs nous louanger sur nos succès apparents que de nous remettre en question et de réviser courageusement nos façons de voir et de faire."

"Comment en est-on venu à oublier la simplicité du message évangélique pour ne se préoccuper que de pieuses "grimaces" ?

Ne penser qu’à soi, à ses biens, à sa doctrine avant d’aider son prochain, c’est être un pain sans levain, un porteur sans bagage, un annonceur sans message, un témoin sans vision, un jardinier sans semence, un jardin sans fleurs, un priant sans adoration ni demandes, tout comme le pharisien de l’Évangile."

Ses modèles de vie :

"François d’Assise, dépouillé de tout, est parti seul sur les routes sans projet de fonder un ordre. Marthe Robin, paralysé et aveugle pendant plus de cinquante ans, n’a jamais projeté l’ouverture de centaines de foyers de charité à travers le monde. Le frère André n’a pas dessiné les plans de la majestueuse basilique qui domine Montréal, pas plus que saint Pierre celle de Rome. André Coindre n’avait pas l’idée de fonder une communauté quand il a ramassé deux enfants abandonnés dans les rues de Lyon."...

... "Même phénomène dans la démarche de l’abbé Pierre, de Vanier et de Pop’s avec sa roulotte. Ils ont tous été les instruments et non des planificateurs de la volonté de Dieu.
Dieu indique sa volonté mais nous sommes aveugles. On la fuit, comme Pierre fuyait Rome pour sauver la patente."

Sur les sorties de communautés

L’unicité de la vision de Claude s’applique à tout ce qu’il voit. Voici ce qu’il écrit à propos des sorties de communautés

"Un mystère mystérieusement mystérieux que ces nombreuses sorties de communauté depuis un demi-siècle. C’est toujours mystérieux, facile aussi de rejeter sur la volonté de Dieu les raisons de la disparition progressive et inéluctable des communautés religieuses. C’est plus facile de se fermer les yeux. On a rejeté les idéaux de Coindre, le soucis de recueillir des enfants en détresse pour jouer à la perfection religieuse. Dieu a fait de même: Il nous a rejetés."

Claude reconnaît que ses conditions de vie présente sont un peu en marge du cadre de vie habituel des
Frères du Sacré-Coeur. Cette longue insertion dans le quartier lui a permis de découvrir un sens souvent ignoré de la pauvreté évangélique.:

"Quelques confrères sont intervenus pour je réintègre les cadres de la communauté. Ils m’ont fait miroiter, certains plus discrètement que d’autres, les avantage matériels d’un retour à la vie commune dans une ou l’autre de nos maisons. … Ce séjour en dehors des cadres ne m’a pas facilité la vie sur le plan matériel. Par contre, ce plongeon dans un milieu défavorisé m’a fait découvrir une dimension nouvelle de la pauvreté que je n’avais vue ni en Afrique, ni en Haïti: la pauvreté spirituelle, l’isolement, quelquefois le mépris. "

Comme un musicien en quête de l’expression la plus achevée de sa mélodie intérieure Claude, assis devant son écran, s'applique tous les jours à décrire les variations infinies du regard qu'il projette sur sa vie et sur son entourage. Ses écrits, la respiration de sa foi, les battements de son coeur.

NDLR
Le texte intitulé PORTEURS DE FLAMME ou TRANSMETTEURS DE TRUCS comme celui titré MORT ou RÉSURRECTION ramassent assez bien, selon moi, la foi qui nourrit son regard sur la vie religieuse et sur l’essentiel de la mission des frères  inspirés par l’exemple d’André Coindre. Pour accéder à ces  textes cliquez ici,
Textes choisis et présentés par Florian Jutras

PORTEURS DE FLAMME ou TRANSPORTEURS DE TRUCS

Bien que certains déplorent que les nécessités du travail en pays dits de mission grugent fortement nos prudentes économies, le dévouement de nos confrères éloignés, par contre, nous rassure et contribue à engourdir notre quiétude. Nos politiques missionnaires, prudentes et réalistes, nous ont trop souvent habitués à privilégier le nombrilisme et la réclusion confortable en cercles fermés au détriment de l’ouverture désintéressée et du service des petits et des pauvres, comme devrait nous inspirer notre vocation.
Un drame: la majorité des communautés religieuses qui s’activaient dans les secteurs de l'éducation ou de la santé ont perdu leur vocation primitive et n'ont pas conservé, ni transmis le charisme de leur fondateur. La vision du développement extraordinaire des petites soeurs de mère Teresa devrait nous ouvrir les yeux. Plaise à Dieu qu’elles ne se mettent pas, elles aussi, à tout rationaliser.
Nos communautés vieillissantes, composées en presque totalité de retraités bien rentés et bien pensants, ne semblent avoir d’autre avenir que celui prévu par l’administration et les finances. On se paye des sessions d'études très sérieuses, des voyages de repos très apostoliques, des sessions spirituelles très pieuses et même des cheminements spirituels très charismatiques qui en conduisent certains jusqu'à imposer les mains pour guérir les malades. C'est de toute beauté. Même beauté que celle des pharisiens qui priaient et jeûnaient, versaient ostensiblement leurs oboles, tout en étant confortablement pétris de bonne conscience. Jésus traita ces prétendus exemples de perfection de pleins de merde: c'est la traduction la plus compréhensible dans notre langage de sépulcres blanchis.

La bonne nouvelle a commencé par le choix de l'humble Marie, une pauvre fille dans un village reculé d'un petit pays. Le Fils de Dieu naît dans une étable. Ses premiers adorateurs sont d’humbles bergers qui ne devaient pas aller souvent au temple. Pour son premier miracle, Jésus multiplie le vin pour une bande de gens déjà joyeux. Il se choisit des apôtres venant de milieux humbles, Il circule chez les pauvres, les nourrit, les guérit et leur transmet un message d'amour extraordinaire dans le Sermon sur le Montagne, bellement résumé dans les Béatitudes. Il ne répugne pas à manger avec les pécheurs, ni à louer la veuve qui donne sa petite obole au temple. Il livre un dernier message à ses proches avant de mourir: "...mon dernier commandement: Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés". Il meurt nu et déchiqueté en amenant un bandit avec Lui au Paradis...
Claude Paradis

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MORT ou RÉSURRECTION

Dans nos communautés nous avons eu plus d’administrateurs que de prophètes. Personnellement, je ne suis ni l’un, ni l’autre. Les dirigeants semblent vouloir cacher cette évidence ou croire pouvoir en retarder ou prévenir la trop brusque disparition de nos communautés. Peut-être veut-on r sécuriser les frères dont la majorité sont des vieillards ou en train de le devenir. Notre confort de pauvres est assuré jusqu’au cimetière, inscription tombale incluse.
Est-ce que le confort, la bonne conscience et l’illusion de se croire encore utiles peut susciter de généreux engagements dans le service des enfants en détresse. Se déculpabiliser est plus commode que s’engager. L’étatisation ne remplacera jamais l’évangélisation, pas plus que les avantages salariaux, le dévouement. Il est plus facile de se voiler la face que risquer de voir la misère et affronter la réalité. C’est à nous d’aller vers les pauvres, non l’inverse.
Pour nous convaincre que le charisme transmis par le fondateur se transmet, on médiatise l’action de certains confrères qui pour passer le temps ou pour s’épanouir davantage s’occupent d’œuvres personnelles.. On aurait mieux fait de rester dans notre jardin plutôt qu’aller jouer dans les plates-bandes des autres. La bonne conscience a remplacé le risque de vivre l’évangile.

Notre fondateur, tout comme les fondateurs d’oeuvres semblables à la nôtre, n’ont pas songé à mettre d’abord sur pied des organisations rationnelles; ils ont plongé dans l’univers de la misère des enfants. Malheureusement, le confort et la bonne conscience ont remplacé le risque de l’engagement dans l’aventure chrétienne comme il est plus facile de prêcher que de s’incarner.
Je souriais ce matin en lisant dans le journal (La Presse 26/09/09) ce passage de Mathieu Brunel, résidant du Vieux-Montréal: “Dans le quartier, il y a un parc pour les chiens; pour les enfants il faut aller très loin”. Jusqu’où devrons-nous aller pour trouver des audacieux?

Claude Paradis



lundi 11 juillet 2011

En mission pour la vie - Jusqu’au bout! Une réflexion sur la mission -

par Jean-Guy Roy S. C.(1)
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Ces réflexions de Jean-Guy Roy
ont été publiées dans une revue communautaire
appelée Le Lien
Nous venons de terminer une décennie pour la moins éprouvante. S’il y a une décennie récente qui a secoué quelque peu nos sécurités, c’est bien celle qui vient de s’esquiver tout doucement sous des airs de rigodon et des odeurs de dinde farcie. La grande aventure des Frères du Sacré-Cœur au Canada a connu elle aussi son lot de défis, de souffrances, de succès et de remises en question. Nos frères plus anciens pourraient nous raconter avec moult détails des débats houleux et parfois, avec un regard rétrospectif sur l’histoire, combien fantaisistes à certains égards. C’est notre histoire sainte après tout. Malgré la raréfaction des vocations et le vieillissement de nos effectifs, la générosité est toujours au rendez-vous dans nos rangs. Nous sommes pétris et façonnés pour le service désintéressé, le don oblatif de nos personnes. C’est l’histoire de notre vie, de notre parcours et de notre destinée. Nous sommes des êtres habités et même imbibés jusqu’au fond de notre âme par la générosité, le don de nous-mêmes. Notre engagement religieux s’inscrit dans cette mouvance épanouissante et plus souvent qu’autrement emballante pour qui sait en mesurer la richesse intrinsèque.
En débutant ce propos sur la mission, le refrain d’une chanson de Robert Lebel me monte aux lèvres :
« Jusqu’au bout de la vie, jusqu’au bout de l’amour,
Gardant toujours cette force tranquille
Qui me libère la vie, qui libère l’amour,
Au jour le jour, à force d’Évangile…
Jusqu’au bout! »

Chers confrères, c’est cela la mission! Le Cardinal Jean-Claude Turcotte, archevêque de Montréal, aime bien redire à l’occasion : « Les sœurs puis les frères, ça meurent deboutte! », en tenue de service. Frères, c’est l’Évangile qui nous tire par en avant, qui chaque matin soulève nos pas devenus quelque peu lourdauds et parfois hésitants au fil des ans. Nous avons été et nous sommes toujours, certes avec moins d’ampleur, de ronflant mais sans moins de pertinence, des artisans signifiants auprès de jeunes et d’adultes en devenir. À chaque jour, des gestes porteurs de sens et de profondeur atteignent par le biais de confrères exceptionnels le cœur de milliers de jeunes et d’adultes qui cherchent, doutent et luttent. À l’extérieur de nos murs, la vie n’est pas toujours un fleuve tranquille, loin de là. Nous sommes parfois pour eux un ami, un confident, un éducateur, une référence et plus souvent qu’autrement un brin d’espoir.

J’ai en mémoire Sœur Estelle Lauzon, sœur de la Providence, assassinée le 13 août 2007 non loin de nos frères de la rue Fullum. J’écrivais dans le journal La Presse ceci: « Sœur Estelle avait 81 ans et s’occupait de réinsertion sociale auprès d’adultes ayant des problèmes psychiatriques ou de dépendance. À son âge, Sœur Estelle aurait pu se reposer bien confortablement après tant d’années de service auprès des démunis. Elle aurait pu visiter les malades ou encore distribuer la communion aux personnes seules comme font plusieurs religieuses âgées. Sœur Estelle était sur le front, auprès de ceux qui souffrent du mal de l'âme, de la désinstitutionalisation de nos centres psychiatriques, de dépendances émanant de notre société éclatée.

Sacrifice d'une femme qui, par conviction et engagement religieux, croyait aux gestes simples qui changent des vies, bousculent des manières de penser et de faire. Elle aura été, sans aucun doute, victime d'un amour qui dépasse nos valeurs superficielles et même notre entendement. Sœur Estelle est morte au combat, pas celui de l'Irak ou de l'Afghanistan, mais celui qui a cours dans nos rues urbaines. » À l’instar de Sœur Estelle, les exemples de frères inspirants pour bien des gens de chez nous sont nombreux.

Il n’y a pas d’âge ou de saison pour la mission. C’est l’appel du meilleur de soi-même au service d’un confrère qui souffre, d’un jeune en crise, d’une chorale à mettre en voix, d’une corvée à finir. Diversifiée et multiforme, elle se déploie admirablement bien dans les différentes œuvres de la province. Les talents et les charismes de chacun ne sont pas emmurés mais ils peuvent s’épanouir selon les capacités et les rythmes de chacun. Entre vous et moi, il n’est pas nécessaire de brasser la même soupe pour être proche, en communion dans la mission. C’est l’esprit de communion qu’il faut développer sans cesse au-delà du faire et parfois même du faire ensemble. Quand je quitte la maison pour le boulot, il importe que je sois en communion avec ceux qui m’envoient, les autres qui partent ailleurs ou qui restent pour l’infirmerie, L’Ancre, l’ESB, L’Arrimage et j’en passe. Je ne suis jamais seul en mission, car je suis un envoyé, encouragé et soutenu par les miens. C’est aussi cela la mission commune!

Nous sommes et nous serons toujours des hommes d’action, des religieux éducateurs; ça nous colle à la peau. Nous sommes en quelque part, selon une expression bien de chez nous, d’excellents faiseux, créateurs et ingénieux, depuis 1872. Le savoir-faire n’a pas de secret dans nos rangs, car il y a tous les talents ou presque. Malgré un âge moyen assez élevé, nous avons toujours un peu de poussière de craie sur nos doigts. Mais nous le savons tous, la mission dépasse évidemment le savoir-faire aussi brillant soit-il. Elle s’inscrit aussi dans une dynamique relationnelle, fraternelle et spirituelle qui sans cesse doit s’évaluer périodiquement en communauté. Il faut être profondément habité par ce qui nous rassemble, nous fortifie, nous réalise et nous édifie. Notre mission ne se réalisera jamais seul si nous restons profondément en esprit de communion avec nos frères et en collaboration étroite avec des laïcs compétents, soucieux de l’avenir de nos œuvres. Notre règle de vie (150) nous rappelle avec sagesse et pertinence ceci: « Avec lucidité, prudence et audace, nous adaptons notre action éducative aux besoins des temps et des lieux, afin de répondre le mieux possible aux appels de l’Esprit. »

Frères, la mission pour la vie, c’est jusqu’au bout!

Frère Jean-Guy Roy, S.C.


1) Frère Jean-Guy Roy est directeur général du réseau radiophonique Radio Ville-Marie et responsable d'une résidence d'étudiants près de l'Université de Montréal. De 1991 à 1997, il a occupé les postes de supérieur provincial à Montréal et d'assistant général de la communauté à Rome. Il est toujours membre du conseil provincial au Canada. Journaliste et animateur de radio, il compte à son actif six publications et près de 350 articles que l'on peut lire sur son blogue au www.radiovm.com .

UNE COMMUNAUTÉ À LA CROISÉE DES CHEMINS

par Jean-Claude Éthier S.C.
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Dans les lignes qui suivent – c’est peut-être évident, mais il faut le dire quand même – j’expose ce que moi je pense de la situation où se trouve la congrégation ici au Canada, et sans doute en beaucoup d’endroits dans le monde.

Personnellement, au plan de la vie religieuse, vu mon âge, j’ai vécu jusque vers la fin des années 1960 sur la lancée de l’esprit «congrégationiste» venu du XIXe siècle français, fortement teinté de la volonté de restauration avec un accent sur les pratiques de dévotions populaires au Sacré-Cœur et à la Sainte-Vierge. J’ai été, comme les confrères de cette période, imbibé de la mentalité de l’ultramontanisme et du cléricalisme. Tous ces courants d’abord venus d’outremer ont été également travaillés par les éléments du contexte social, politique et religieux dans le milieu canadien et québécois.

La mission était alors claire pour la congrégation : faire œuvre d’éducation dans les écoles élémentaires publiques et dans des collèges privés où l’on répondait à un besoin particulier; il s’agissait d’offrir aux jeunes un cours d’études secondaires qui se présentait comme une alternative au traditionnel cours classique qui ouvrait sur les études universitaires.

La réforme du système de l’éducation, allant de pair avec la baisse de l’emprise du clergé sur celui-ci, la révolution culturelle et le concile Vatican II, suivis du mouvement de sécularisation des institutions scolaires et celles de la santé auront des répercussions immenses sur les instituts de vie apostolique comme le nôtre.

Tout changea profondément dans les communautés : le lien communautaire, l’horaire, le style de vie, le rapport avec le monde, les exercices de piété et la mission qui devait être désormais redéfinie.

Puisque nous aboutissons assez brusquement à l’abandon presque complet de l’engagement traditionnel dans les écoles, nous avons commencé à explorer des pistes nouvelles «d’apostolat» étant donné que nous devions également faire face à trois problèmes : le tarissement de la relève, les sorties de l’institut et le vieillissement des effectifs. Voici quelques-unes des pistes qui ont été empruntées :

a) les divers services de pastorale (diocèse, paroisse)
b) la ligne prophétique de la vie religieuse (engagement social)
c) les œuvres sociales et humanitaires
d) les mouvements spirituels nouveaux (charismatique, entre autres)
e) les missions lointaines

Une des conséquences du chambardement des années 1960 et 1970 a été pour moi, et sûrement pour beaucoup d’autres, la nécessité, en quelque sorte, de rebâtir une nouvelle théologie de la vie religieuse et de découvrir une spiritualité plus adéquate. Il fallait combler le besoin de sens.

Le leadership de la congrégation a tenté au cours des quarante dernières années de susciter une reprise : essor nouveau, élan, relance, revitalisation sont des mots qui ont été utilisés pour exprimer une volonté d’assurer un avenir à la congrégation, pour éviter de déboucher sur l’extinction.

Cependant les nombres continuent à baisser et le vieillissement se poursuit.

Tout est-il joué?

En ce qui me concerne, je me propose bien de finir mes jours comme Frère du Sacré-Cœur dans la sérénité et dans la confiance que Dieu fera naître des choses nouvelles : c’est là le fondement du mystère chrétien.

Le défi est grand pour ceux qui veulent maintenir vivant notre projet Frères du Sacré-Cœur. En plus de garder «la flamme allumée», il leur faut dessiner une «autre peau» et écrire leur propre histoire.

Au demeurant, la communauté de l’avenir sera formée de frères qui seront forcément des chercheurs, en quête de la Bonne Nouvelle pour leur temps et adeptes de la contemplation.

Jean-Claude

«Comment j’entrevois la vie religieuse dans l’avenir»

par Brother Marcel Rivière S. C.
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Venons-en aux réponses que je donnerais à la question que tu as posée.

1. Nous pourrions comparer le concile Vatican II au big bang : un phénomène qui bouleverse de fond en comble notre époque. Vatican II est comme la première manifestation du changement de paradigme auquel nous sommes confrontés. Il consiste en une sorte de prise de conscience ou encore un appel impératif, pour les membres des communautés religieuses de se renouveler en profondeur afin de devenir signifiants pour nos contemporains.

2.La difficulté que les religieux et les religieuses éprouvent concernant la consigne du Concile Vatican II de se renouveler complètement vient du fait que l’Église elle-même a enseigné durant des siècles que la vérité est inaltérable, qu’elle ne change pas. L’Église a condamné le modernisme comme une erreur grave.

Il faut aussi tenir compte du fait que les dirigeants de l’Église souhaitent «restaurer» l’Église en revenant aux formules et aux manières de faire de la période d’avant Vatican II. Repenser véritablement la vie religieuse, imaginer un autre modèle de vie religieuse est extrêmement difficile.

3. Peu après le concile Vatican II, nous, les frères, sommes passés d’une spiritualité presque monastique à une spiritualité apostolique, à une spiritualité qui voulait se situer dans le courant de notre temps.

4. À titre d’exemples, j’indique quelques concepts qui sont apparus à la suite du Concile Vatican II.

- Les vœux. La pauvreté a été présentée comme disponibilité, ouverture au service des autres; la chasteté comme relations bienveillantes, accueillantes; l’obéissance comme écoute des autres, de la communauté (de l’ensemble de nos frères et sœurs chrétiens) en étant attentifs à l’inspiration de l’Esprit Saint.

- Dieu. La notion de Dieu a évolué; elle s’est trouvée liée davantage à la notion de création comme conséquence d’une intuition nouvelle face à la vie, à la création elle-même comprise comme première révélation; Dieu est situé au cœur de la création et de l’univers.

- Les relations. Nous nous rendons de plus en plus compte que Jésus donnait préséance aux relations, qu’il enseignait que la grâce de Dieu touche chacun, toute la création. Chacun de nous, tous les êtres, sont objets de l’amour de Dieu; Dieu appelle chacun à la vie en plénitude, à la liberté.

5. Le sens de la vie religieuse (durant la vie du Père André Coindre, de même qu’avant et après) était déterminé par la loi de l’Église, par ses dirigeants. Les religieux et les religieuses étaient perçus comme une «équipe de travail», «un corps d’ouvriers rompus à la mission»; c’est ce que les fondateurs et les fondatrices envisageaient et dont ils et elles rêvaient pour leurs disciples.

La vision des fondateurs et fondatrices était prophétique en ce qu’elle constituait une excellente réponse à un besoin urgent, étant donné les conditions déplorables dans lesquelles se trouvaient des êtres humains dans plusieurs régions du monde.

L’aspect institutionnel de la vie religieuse, de même que cette dimension «ouvriers et ouvrières pour la mission» avaient leur importance pour donner forme et stabilité à l’intuition du fondateur ou de la fondatrice, mais là n’était pas l’essence même de la vie religieuse. La vie religieuse est d’ordre prophétique, et comme le ministère exercé par Jésus, elle n’est pas d’ordre hiérarchique, institutionnel, culturel et social. Il semble que l’appel fait à la vie religieuse aujourd’hui est de retrouver son caractère prophétique et de renouer avec sa mission institutionnelle traditionnelle et sa réalité propre.

6. Le concile Vatican II a rappelé que le fondement de la vocation est le sacrement de baptême; on reconnaît de ce fait que les laïcs peuvent exercer un ministère. Au cours des ans, nous en avons tenu compte. En effet, les laïcs ont pris charge de nos écoles; ce qui est excellent. Il semble bien qu’il leur reviendra comme ministère de poursuivre l’œuvre d’éducation catholique entreprise et de l’améliorer. La province de la Nouvelle-Orléans s’est mise en frais de préparer des partenaires laïques pour l’œuvre d’éducation catholique depuis plus de trente ans maintenant.

7. Le thème de notre prochain chapitre général (notre 35e) : «Un appel à la mission prophétique» me semble signaler que nous devons retrouver notre caractère prophétique. Comme le Père Coindre a tenté de le faire, notre caractère prophétique doit nous faire découvrir une voie, une issue, afin que nous répondions à des besoins urgents et évidents; il nous faut exercer un ministère qui nous fasse accéder à un autre niveau de prise de conscience et de vision spirituelle.

8. Quelques traits de la vie religieuse aujourd’hui :

- Prière partagée.
- Discernement spirituel communautaire.
- Participation à un ministère.
- Disponibilité innovatrice.
- Importance accordée aux relations.

9. Le plan de match d’aujourd’hui : refonder la vie religieuse. Pourquoi? Nous ne vivons plus dans un contexte de fondation; on ne perçoit plus tel besoin comme urgent. L’aspect prophétique qui est à l’origine d’une fondation n’est plus du tout là.

Voilà! Je serais heureux de poursuivre cet échange si quelqu’un le voulait bien.

Frère Marcel Rivière, S.C.
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Curriculum vitae de Marcel Rivière
Frère Marcel Rivière est originaire Thibodeau en Louisiane,
Son parcours est semblable à celui de tout Frère du Sacré-Cooeur de la première province communautaire en Amérique. (Province d'Amérique - 1847 - Province des États-Unis, 1900 - Province de New Orleans 1960) Peu de temps après son noviciat et ses premières années d'enseignement on lui confie la charge de Maître des Scolastiques.
En 1958 Il fait partie du premier groupe d'étudiants à Jesus Magister -  Après trois ans d’études à Jesus Magister, Frère Marcel devint maître des scolastiques de la province New Orleans, poste qu’il occupa jusqu’en 1970. Il fut alors élu Assistant-Général à Rome, charge qu’il occupera pendant dix-huit ans (1970-1988).

À la fin de son mandat comme Assistant, il prend la direction de la communauté de Baie St-Louis, Mississipi rattachée au High School St. Stanislas. En 1993 il est le fondateur et le directeur du Centre international André-Coindre (CIAC) à Lyon en France. De 2003 à 2005 il demeure dans la maison de retraite de Bay St. Louis. Lorsque la maison fut détruite par l’ouragan Katrina, en 2005, il se rend en Arizona où il occupe l’école originale construite en 1902 par St. Catherine Drexel dans la réserve de Navajo avec deux autres confrères qui enseignent à l’école indienne St. Michael.